Consulter les astres, les tarots… On peut faire appel aux outils ancestraux sans nécessairement tomber dans des visions passéistes et les grimoires ésotériques d’antan.
Astrologues, tarologues, magnétiseuses, voyantes, rebouteuses… Les nouvelles sorcières écoutent, apaisent, aident et soignent parfois. Des femmes (et des hommes) qui assument le terme de «sorcières» et se vivent comme des professionnelles de la relation d’aide. Les sorcières ont toujours existé, mais depuis l’apparition du positivisme, qui voulait nous faire croire que la science va tout ordonner, soigner, sauver, l’éducation et le «savoir» ont pris le pas sur l’intuition, la clairvoyance, l’irrationnel, sans pour autant parvenir à l’éradiquer. Même si la loi de notre république rationaliste s’est efforcée de border tout ce qui ressemble de près ou de loin à l’exercice d’une quelconque médecine, notre monde est toujours peuplé de ces femmes dont le nom circule de bouche à oreille.
Pourquoi même les plus raisonnables d’entre nous, sans les substituer aux médecins et aux psys – les « sorcières » qui prétendent le contraire sont à fuir immédiatement, sont-ils tentés de se retrouver un jour ou l’autre chez ces « sorcières » pour y voir plus clair, trouver un sens à l’inexpliqué. Instruites, parfois très diplômées, elles ont décidé de gagner leur vie en utilisant des méthodes introuvables dans les facultés. Ces femmes “nous ouvrent la possibilité de construire un réel qui ne passe pas par la rationalité mais par l’imaginaire, le destin, la possibilité de faire autre chose de notre vie”, explique le sociologue Serge Dufoulon, enseignant-chercheur à l’université de Grenoble-II.
Pour Marie-Claire Eskinazi, psychanalyste jungienne : “Elles surgissent toujours au moment des transformations et des mutations.” Elles sont des « sorcières » modernes : des passeuses, des écouteuses, des «aideuses» qui, toutes, ont eu du mal à admettre qu’elles portent en elles « quelque chose de spécial », et ont accepté d’en faire leur activité. Elles disent avoir, depuis toujours, un lien particulier, très intuitif, avec la nature et avec les êtres vivants. Et l’envie de comprendre, et d’aider à comprendre, les a poussées petit à petit, le plus souvent un peu contre leur gré, à bifurquer vers une vie dédiée à recevoir et écouter, aider et transmettre, trouver un sens à l’inexpliqué et tenter d’aller mieux !
Des progrès du XXe siècle, ces nouvelles sorcières ont appris le pouvoir de l’écoute bienveillante et de la parole, et son impact sur l’inconscient. Elles n’hésitent pas à suggérer d’aller voir un médecin ou un psy, elles découragent leurs clients de les consulter trop régulièrement et refusent la toute-puissance d’une relation de dépendance affective ou financière. En plus d’être dépositaires de savoirs ancestraux et de mystères encore inexplorés, dont elles savent que « ça marche » sans savoir dire pourquoi, elles ont développé une finesse d’accompagnement, qui les protège du désir d’emprise que leurs « pouvoirs » pourraient nourrir et faire prospérer. C’est à cela qu’une « bonne sorcière » se reconnaît d’un charlatan : dans sa capacité modeste et discrète à aider ceux qu’elle reçoit, pour un prix raisonnable, à devenir plus libres et plus autonomes face à leur destin. Sans poudre de perlimpinpin. Des femmes libres et indépendantes au service des autres !